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21 octobre 2017 6 21 /10 /octobre /2017 16:54

BRÈVE HISTOIRE DE LOTAN

DE 1991 À NOS JOURS

(1)

Manlio Dinucci

 

 

   LOtan, fondée le 4 avril 1949, comprend pendant la guerre froide seize pays : Etats-Unis, Canada, Belgique, Danemark, France, République fédérale allemande, Grande-Bretagne, Grèce, Islande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Espagne, Turquie. A travers cette alliance, les Etats-Unis conservent leur domination sur les alliés européens, en utilisant lEurope comme première ligne dans la confrontation, y compris nucléaire, avec le Pacte de Varsovie. Ce dernier, fondé le 14 mai 1955 (six ans après lOtan), comprend Union Soviétique, Bulgarie, Tchécoslovaquie, Pologne, République démocratique allemande, Roumanie, Hongrie, Albanie (de 1955 à 1968).

 

 

DE LA GUERRE FROIDE À LAPRÈS-GUERRE FROIDE

 

En 1989 survient l’ « écroulement du Mur de Berlin » : cest le début de la réunification allemande qui se réalise quand, en 1990, la République Démocratique se dissout en adhérant à la République Fédérale dAllemagne. En 1991 se dissout le Pacte de Varsovie : les pays de lEurope centre-orientale qui en faisaient partie ne sont alors plus alliés de lURSS. Dans la même année, se dissout lUnion Soviétique : à la place dun unique état sen forment quinze.

  La disparition de lURSS et de son bloc crée, dans la région européenne et centre-asiatique, une situation géopolitique entièrement nouvelle. Dans le même temps, la désagrégation de lURSS et la profonde crise politique et économique qui frappe la Russie signent la fin de la superpuissance en mesure de rivaliser avec celle des Etats-Unis.

   La guerre du Golfe de 1991 est la première guerre, dans la période suivant le second conflit mondial, que Washington ne justifie pas par la nécessité de contenir la menaçante avancée du communisme, justification qui a été à la base de toutes les précédentes interventions militaires étasuniennes dans le « tiers monde », de la guerre de Corée à celle du Vietnam, de linvasion de la Grenade à lopération contre le Nicaragua. Avec cette guerre les Etats-Unis renforcent leur présence militaire et leur influence politique dans laire stratégique du Golfe persique, où se concentre une grande partie des réserves pétrolières mondiales.

   En même temps Washington lance à ses adversaires, ex adversaires et alliés un message sans équivoque. Il est contenu dans la National Security Strategy of the United States (Stratégie de la sécurité nationale des Etats-Unis), le document par lequel la Maison Blanche énonce, en août 1991, sa nouvelle stratégie.

   « Malgré l’émergence de nouveaux centres de pouvoir - souligne le document signé par le président- les Etats-Unis restent le seul Etat avec une force, une portée et une influence en toutes dimensions - politique, économique et militaire - réellement mondiales. Dans les années 90, tout comme pour la grande partie de ce siècle, aucun substitut nexiste au leadership américain ».

  Six mois après la directive présidentielle, un document provenant du Pentagone - Defense Planning Guidance for the Fiscal Years 1994-1999 (Guide pour la planification et la Défense pour les années fiscales 1994-1999), filtré à travers le New York Times en mars 1992, clarifie ce qui dans la directive présidentielle devait rester nécessairement implicite : le fait que, pour exercer leur leadership mondial, les Etats-Unis doivent empêcher que dautres puissances, y compris les anciens et les nouveaux alliés, ne puissent devenir  des concurrentes : « Notre premier objectif est dempêcher la réémergence dun autre rival, sur le territoire de lUnion Soviétique ou ailleurs, qui pose une menace de lordre de celle précédemment posée par lUnion Soviétique. Nous devons empêcher quaucune   autre puissance hostile ne domine une région dont les ressources, si elles étaient étroitement contrôlées, suffiraient à générer une puissance mondiale. Ces régions comprennent lEurope occidentale, lAsie orientale, le territoire de lex Union Soviétique et lAsie sud-occidentale ».

   Dans un tel cadre, souligne le document, « il est d une importance fondamentale de préserver lOtan comme principal instrument de la défense et de la sécurité occidentales, ainsi que comme canal de linfluence et de la participation étasuniennes dans les affaires de la sécurité européenne. Tandis que les Etats-Unis soutiennent lobjectif de lintégration européenne, ils doivent essayer dempêcher la création de dispositifs de sécurité uniquement européens, qui mineraient lOtan, en particulier la structure de commandement de lAlliance », cest-à-dire le commandement USA.

 

 

LE NOUVEAU CONCEPT STRATÉGIQUE DE LOTAN

 

Pendant quils réorientent leur propre stratégie, les Etats-Unis font pression sur lOtan pour quelle en fasse autant. Pour eux il est de première urgence de redéfinir non seulement la stratégie, mais le rôle-même de lAlliance atlantique. Avec la fin de la guerre froide et la dissolution du Pacte de Varsovie et de lUnion Soviétique même, se dissipe en effet la motivation de la « menace soviétique » qui a maintenu jusque là la cohésion de lOtan sous lindiscutable leadership étasunien : le danger existe donc que les alliés européens fassent des choix divergents voire jugent lOtan inutile dans la nouvelle situation géopolitique qui sest créée dans la région européenne.

   Le 7 novembre 1991 (après la première guerre du Golfe, à laquelle lOtan a participé non officiellement en tant que telle, mais avec ses forces et structures), les chefs dEtat et de gouvernement des seize pays de lOtan, réunis à Rome dans le Conseil atlantique, lancent « Le nouveau concept stratégique de lAlliance ». « Contrairement à la menace prédominante du passé - affirme le document- les risques qui demeurent pour la sécurité de lAlliance sont de nature multiforme et multidirectionnels, chose qui les rend difficiles à prévoir et évaluer. Les tensions pourraient conduire à des crises dommageables pour la stabilité européenne et jusqu’à des conflits armés, qui pourraient engager des puissances extérieures ou se répandre jusqu’à lintérieur des pays de lOtan ». Face à ces risques et dautres, « la dimension militaire de notre Alliance reste un facteur essentiel, mais le fait nouveau est quelle sera plus que jamais au service dun ample concept de sécurité ».

   En définissant le concept de sécurité comme quelque chose qui nest pas circonscrit à laire nord-atlantique, on commence à dessiner la « Grande Otan ».

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